Se sentir légitime
Vous sentez-vous légitime ? Si je vous pose cette question c'est parce que je me la pose à moi aussi. Constamment. Suis-je légitime de faire ce que je fais ?
D’ailleurs, savez-vous ce qu’est la légitimité ? Et je ne parle pas de la définition que nous donne le dictionnaire.
Dans notre vie quotidienne, les gens ne font que remettre en cause la légitimité que l’on peut avoir sur tel ou tel sujet si on n’est pas considéré comme expert dans le domaine en question. Rein qu'à partir du moment où l'on a un diplôme dans un domaine, on est considéré comme légitime aux yeux des gens.
Dans la réalité, la légitimité ne se limite pas qu'à des diplômes. Dans la réalité, n’importe qui peut être expert sur n’importe quoi.
« Pour qui te prends-tu pour donner des conseils ? »
J’ai déjà eu le droit à cette question de nombreuses fois (un peu trop à mon goût) et, toutes ces fois, je n’ai pas su quoi répondre (avoir de la répartie dans les situations où je ne suis pas à l’aise, ce n’est pas vraiment mon truc). J'ai bien essayé de parler mais, très vite, je me suis tue, pour éviter de passer pour une personne prétentieuse, pour une personne qui sait tout mieux que tout le monde. Parce que, c’est vrai, je ne sais pas tout mieux que tout le monde et, dans le fond, je n’ai rien de spécial.
Je me suis mise à douter. Ai-je vraiment ma place ici ou ne suis-je faite que pour exécuter des ordres sans remettre quoi que ce soit en question ? Sans avoir mon mot à dire ? Sans affirmer que, moi aussi, j’existe et que, moi aussi, j’ai du vécu ?
Cette question, un peu méchante de mon point de vue et dite uniquement par des personnes se pensant elles-mêmes légitimes, a fait surgir pleins de peurs en moi, surtout celle d’être moins légitime que d’autres pour parler d’un sujet.
C’est vrai ça, pour qui je me prends ? Qu’est-ce que j’ai de plus que les autres ? Qu’est-ce que j’ai à apporter ?
Avec ce blog, cette question m’est revenue en tête, surtout en voyant mes statistiques augmenter et, avec elles, la peur que l’on remette à nouveau en cause qui je suis. Alors, j’ai bien pris le temps d’y réfléchir. Dans cet article vous allez donc avoir le droit à mes réflexions sur ce sujet.
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Pas plus légitime…
Qu’est-ce que j’ai de plus que les autres ? Rien et, en même temps, tout.
Tout, parce que personne d’autre n’est comme moi, personne n’a vécu les mêmes expériences que moi de la même façon. Par exemple, je peux vous parler du deuil, de la séparation, du harcèlement, de mon aventure blogging et de tout un tas d’autres sujets, je ne pourrai jamais le faire de la même manière de quelqu’un d’autre.
Et c’est génial, ça signifie que l’on a tous quelque chose à apporter au monde.
Mais c’est compliqué d’apporter quelque chose si on parle d’un sujet que l’on n’a pas vécu. Ce que j’ai appris à l’école, dans les livres, à la télé, par des discussions, je peux le rapporter mais je ne sais pas ce que c’est.
Pour cette raison, je me sentirais bien illégitime de vous parler de quelque chose que je n’ai pas vécu car je ne ferais que reprendre les mots d’autres personnes.
En revanche, je peux vous parler de ce que j’ai vécu, de mes expériences, de la façon dont je perçois les choses et le monde, des leçons que j’ai tirées de tout ce que j’ai expérimenté depuis mon enfance.
J’ai vécu suffisamment de choses par moi-même, je n’ai pas besoin de reprendre les expériences des autres. Et non, les gens n’ont pas à remettre en cause mon vécu et, moi, je n’ai pas à le remettre en cause.
Je ne sais pas si ça vous arrive aussi, si, parfois, vous avez l’impression que ce que vous avez vécu n’a pas réellement existé, comme si vous l’aviez un peu fantasmé. Moi, c’est souvent le cas, raison pour laquelle j’écris absolument tout, histoire d’avoir une trace de ce qu’il s’est passé et la certitude que je ne l'ai pas rêvé.
… Mais pas moins non plus
Qu’est-ce qui me fait croire que je suis plus légitime que quelqu’un d’autre pour aborder tel ou tel sujet ? Croyez-moi que si tout le monde se posait cette question, personne ne parlerait jamais de rien, aucun blog n’existerait.
Il n’est pas nécessaire d’être expert dans un domaine temps que ce dont on parle est une chose que l’on connaît un minimum, une chose dont on a fait l’expérience, une chose qui nous intéresse. Porter de l’intérêt à un sujet, c’est déjà être légitime d’en parler.
Quelle est ma légitimité à évoquer tel ou tel domaine ? Ma légitimité à bloguer ? Ma légitimité à penser que ma vie et mes pensées sont suffisamment intéressantes pour être exposées sur internet ? Ou, plus simplement, quelle est ma légitimité à vivre (ok, je vais peut-être un peu loin mais vous voyez où je veux en venir) ?
Parce que, dans le fond, n’importe quelle blogueuse se sent légitime d’écrire à un moment donné et pense que sa vie va intéresser les gens. Je ne déroge pas à la règle parce que, même si j’écris en ce moment dans mon logiciel de traitement de texte, j’ai bien conscience qu'une fois que cet article sera publié, n’importe qui pourra le voir. Et si je pensais que mes réflexions ne vous intéressaient pas (peut-être que c’est le cas), soyez assurés que je les garderais privées.
Je repense à une remarque que l’on m’a faite, une fois, qu’à mon âge, je n’avais rien vécu. Vraiment ? Qu’en savait la personne ? En quoi était-elle légitime pour me dire ça ? Elle ne connaissait pas ma vie et elle ne pouvait pas savoir que je ne peux pas écrire des choses que je ne pense pas.
Simplement parce que, ce que je ne pense pas, je ne l’ai pas vécu.
C’est là le point essentiel.
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Alors, quand est-on légitime ?
Selon moi, je suis légitime à parler d’un sujet à partir du moment où je l’ai expérimenté de près ou de loin.
À partir du moment où a vécu quelque chose, on peut en parler parce que l’on a forcément un point de vue sur la question, parce qu’on a quelque chose à apporter, parce que l’on sait ce que c’est.
Par exemple, je ne vais pas vous parler de ce que c’est d’opérer quelqu’un puisque je ne suis pas chirurgienne, je n’ai pas fait d’études de médecine et parce que, opérer quelqu’un, je ne l’ai jamais fait et je ne peux pas connaître les sensations que l’on ressent avant, pendant et après.
J’aurais très bien pu vous parler du syndrome de l’imposteur mais, suis-je légitime pour le faire ? J’ai l’impression que le syndrome de l’imposteur est à la mode, que beaucoup pensent l’avoir et moi, eh bien, je n’en ai aucune idée. Je ne sais pas si je l’ai. Je ne sais pas si je suis là où est ma place et je ne sais pas si je suis à même de vous en parler.
Je n’ai peut-être rien de spécial au yeux des gens mais, pour moi, j’ai tout de spécial car je sais ce que j’ai vécu et tout ce que ça m’a apporté. Du négatif, du positif mais, surtout, de l’expérience.
Alors, pour qui je me prends ? Je me prends pour moi et j’estime que c’est très bien et amplement suffisant.




